La défiance des Français envers la politique atteint un niveau record !

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Ainsi en 1792 a-t-on aboli une Monarchie contre la volonté du peuple et aujourd’hui, en 2013, on s’entête à maintenir une République sous perfusion dont les Français ne veulent plus ? Voici les résultats d’une étude Cevipof publiés par Le Monde… Ils n’appellent qu’une question : qu’attend-on pour appeler Louis XX !

Pendant la campagne présidentielle, François Hollande ne manquait jamais une occasion de le rappeler : « Je suis le candidat de la confiance. » Meeting après meeting, il affichait cette ambition : « Je veux redonner confiance à la France. » Huit mois après son élection, force est de constater qu’il a échoué. C’est ce que montre la dernière vague « baromètre de la confiance politique », publiée mardi 15 janvier par le Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), en partenariat avec le Conseil économique social et environnemental.

Réalisée par Opinionway du 5 au 20 décembre 2012 auprès d’un échantillon de 1509 personnes représentatif de la population française en âge de voter, cette enquête est d’autant plus intéressante qu’elle est la quatrième de ce type depuis 2009, ce qui permet de mesurer les évolutions – parfois très nettes – de l’état d’esprit des Français au cours de la période.

CRISE ET DÉCEPTION

En l’espace de trois ans, la dégradation de leur moral est patente. 32 % des personnes interrogées se disent aujourd’hui gagnées par la « méfiance » : elles étaient 27 % fin 2009. Quant au sentiment de « morosité« , il touche désormais 31 % de la population (+ 6 points). « En 2009, le niveau de défiance était déjà très élevé. Il est devenu vertigineux« , observe Pascal Perrineau, directeur du Cevipof, qui voit à cela deux raisons : « l’enracinement de la crise » et « la déception qui a suivi la présidentielle« .

Contrairement aux espoirs de M. Hollande, l’alternance n’a pas permis d’enrayer la progression de la « défiance« , tout au moins de la défiance vis-à-vis du pouvoir. En octobre 2011, 83 % des Français estimaient que les responsables politiques ne se préoccupaient pas d’eux. L’on aurait pu penser que la présidentielle, avec l’ouverture d’un cycle de réformes, ferait baisser ce sentiment. Il n’en est rien : désormais, 85 % des Français estiment que leurs dirigeants ne tiennent pas compte de leur avis.

En trois ans, l’image que se font les citoyens de leurs institutions s’est beaucoup dégradée. Fin 2009, trois d’entre elles bénéficiaient d’un niveau de confiance supérieur à 50 % : le conseil municipal, le conseil général et le conseil régional. Seul le premier reste dans ce cas, mais lui non plus n’a pas résisté au doute général : depuis 2009, la proportion des Français qui font confiance à leurs élus municipaux est passée de 66 % à 56 %.

Cette crise qui touche tous les étages de la représentation politique a un corollaire: le sentiment que la démocratie fonctionne mal. 54 % des Français sont de cet avis. Ils étaient 48 % fin 2009.

Si rien ne semble en mesure de les immuniser contre le poison du désenchantement démocratique, les Français continuent néanmoins de faire confiance aux personnes qu’ils connaissent, aux membres de leur famille et à leurs voisins. La confiance en soi a aussi tendance à progresser. 61 % considèrent ainsi qu’ils ont le contrôle de leur propre vie (+ 3 points en trois ans).

De plus en plus morose, de plus en plus inquiète pour son avenir, la société française n’est donc peut-être pas devenue pour autant une « société de défiance« , pour reprendre une expression des économistes Yann Algan et Pierre Cahuc. C’est ce que pense Pascal Perrineau, pour qui le phénomène intéressant tient précisément à ce « clivage croissant, souvent au sein du même individu entre une « confiance pour l’en-bas » et une « méfiance vis-à-vis de l’en-haut«  ».

Pour le directeur du Cevipof, cette opposition grandissante entre la confiance qu’inspire ce qui est proche et la méfiance que suscite ce qui paraît lointain est une clé de compréhension majeure de la société française. D’une façon générale, ce qui est considéré comme identique rassure, alors que ce qui est perçu comme différent inquiète, et ce de plus en plus. De ce point de vue, l’exemple de la peine de mort est saisissant : entre décembre 2009 et octobre 2011, la part de Français qui se disaient favorables à son rétablissement était passée de 32 % à 35 % ; au cours de la seule année écoulée, elle est passée de 35 % à 45 %.

En trois ans, les valeurs d’ordre ont progressé tous azimuts, parfois fortement. Fin 2009, 49 % des électeurs pensaient qu’il y avait trop d’immigrés en France : ils sont 65 % aujourd’hui. A l’époque, ils étaient 73 % à faire confiance aux personnes ayant une religion différente de la leur : ils sont désormais 68 %. Enfin, 58 % des personnes interrogées estimaient alors que les couples homosexuels devaient avoir le droit de se marier : ils ne sont plus que 52 %.

MOINS DE CONTRAINTES ÉCONOMIQUES

Moins libéraux sur le plan culturel, les Français le sont en revanche davantage sur le plan économique. Là aussi, les évolutions sont fortes et rapides. A la question : « Pensez-vous que l’Etat doit faire confiance aux entreprises et leur donner plus de liberté ?« , la part des Français répondant « oui » avait légèrement baissé entre 2009 et 2011 (de 43 % à 41 %). Depuis, la courbe s’est inversée : ils sont désormais 53% à partager cette opinion.

Quant à la question : « Pensez-vous que le capitalisme doit être réformé en profondeur ?« , elle recueille 41 % de réponses positives, contre 49 % il y a un an. Enfin, les Français ne sont plus que 53 % à penser que, « pour rétablir la justice sociale, il faut prendre aux riches pour donner aux pauvres » : ils étaient 73 % il y a un an.

Davantage d’autorité dans la sphère sociétale mais moins de contraintes sur la scène économique : sept mois après l’élection présidentielle, les valeurs qui progressent dans la société française sont en profond décalage avec ce qui, ces dernières décennies, a constitué le substrat idéologique dominant de la gauche. On mesure l’ampleur du défi pour M. Hollande : il doit redonner confiance à un pays qui l’a perdue, mais le faire dans un contexte où de moins en moins de Français semblent partager les valeurs traditionnellement défendues par sa famille politique.

Thomas Wieder pour Le Monde

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