Avant les manifestations contre le projet de loi, Benoît XVI a une nouvelle fois encouragé les évêques de France à ne pas avoir peur de combattre tout en respectant la laïcité.
Benoît XVI a appelé samedi matin à Rome les évêques français à parler sans «peur», avec «vigueur» et «détermination» dans les «débats importants de société», comme les «projets de lois civiles pouvant porter atteinte à la protection du mariage entre l’homme et la femme». Le tout «sans arrogance» et avec «respect» en particulier de la «tradition française» de la laïcité, et en soutenant les catholiques qui «sont engagés dans la vie publique».
L’enjeu étant pour le Pape «l’énorme défi à vivre dans une société qui ne partage pas toujours les enseignements du Christ, et qui parfois cherche à ridiculiser ou à marginaliser l’Église en désirant la confiner dans l’unique sphère privée.»
Ce n’est pas un discours de circonstance, mais il se trouve que Benoît XVI recevait, samedi au Vatican, un tiers des évêques français. Comme le veut la tradition, il leur adresse un grand discours où il leur indique des priorités d’action. Mais, à quelques heures des manifestations françaises contre le projet de loi sur le mariage homosexuel, ce que le Pape a pu dire a pris un poids tout particulier car cela revient à encourager directement et une nouvelle fois, l’Eglise de France à s’engager dans la bataille en justifiant une action publique.
«Ne pas avoir peur»
Le Pape a tout d’abord insisté sur «la vocation singulière» de la France et de «sa longue histoire chrétienne qui ne peut être ignorée ou diminuée». Une réalité qui donne aux évêques français une responsabilité, et qui suscite chez les fidèles une grande attente: «Non seulement les fidèles de vos diocèses, mais ceux du monde entier, attendent beaucoup, n’en doutez pas, de l’Église qui est en France .»
Conséquence directe: ne pas avoir «peur» de parler«dans les débats importants de société» où «la voix de l’Église doit se faire entendre sans relâche et avec détermination»: «N’ayons donc pas peur de parler avec une vigueur toute apostolique du mystère de Dieu et du mystère de l’homme, et de déployer inlassablement les richesses de la doctrine chrétienne. Il y a en elle des mots et des réalités, des convictions fondamentales et des modes de raisonnement qui peuvent seuls porter l’espérance dont le monde a soif.»
Le tout dans le cadre culturel français, marqué par la laïcité. Il faut agir «dans le respect de la tradition française en matière de distinction entre les sphères des compétences de l’Église et de celles de l’État».
Le Pape a ensuite expliqué pourquoi les évêques ne doivent pas avoir de complexe dans leur prise de position à condition d’allier le spirituel au rationnel. Cette «harmonie qui existe entre la foi et la raison vous donne une assurance particulière: le message du Christ et de son Église n’est pas seulement porteur d’une identité religieuse qui demanderait à être respectée comme telle ; il porte une sagesse qui permet d’envisager avec rectitude les réponses concrètes aux questions pressantes, et parfois angoissantes, des temps présents.»
«L’Église a besoin de témoins crédibles»
Benoît XVI a d’autant insisté sur la rationalité du discours de l’Église que «la France peut s’honorer de compter parmi ses fils et ses filles nombre d’intellectuels de haut niveau dont certains regardent l’Église avec bienveillance et respect. Croyants ou non, ils sont conscients des immenses défis de notre époque, où le message chrétien est un point de repère irremplaçable. Il se peut que d’autres traditions intellectuelles ou philosophiques s’épuisent: mais l’Église trouve dans sa mission divine l’assurance et le courage de prêcher, à temps et à contretemps (…)».
Après cette analyse fouillée du contexte français, Benoît XVI a rappelé que «l’Église a besoin de témoins crédibles» que les évêques «par la force de l’exemple» sauront «encourager» notamment dans «leur attachement et leur fidélité à l’enseignement moral de l’Église». Les catholiques, en l’occurrence, devront donc avoir «le courage d’afficher leurs convictions chrétiennes, sans arrogance mais avec respect, dans les divers milieux où ils évoluent».
Et a fortiori, les catholiques «qui sont engagés dans la vie publique». Les évêques doivent les soutenir, autour de ce programme d’action précis: «Avec les Évêques, ils auront à coeur d’être attentifs aux projets de lois civiles pouvant porter atteinte à la protection du mariage entre l’homme et la femme, à la sauvegarde de la vie de la conception jusqu’à la mort, et à la juste orientation de la bioéthique en fidélité aux documents du Magistère.»
Le Figaro