Faudra-t-il un printemps français ?

Un homme s’immole en Tunisie. C’est le Printemps arabe. En France, c’est le début… d’un buzz médiatique. Charles Consigny veut réveiller notre pays.

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La semaine dernière, un homme s’est planté devant une agence Pôle emploi et a mis le feu à ses vêtements qu’il avait imbibés d’essence. Le temps pour les gens qui étaient là d’essayer de le sauver, c’était trop tard, il est mort brûlé. On n’est pas parvenu à décrocher la corde du pendu. À cet homme on avait refusé des allocations, il n’avait pas suffisamment cotisé, ou pas dans les règles, quelque chose comme ça. Les médias ont relaté les faits, les gens qui travaillent à la gestion du chômage ont invoqué leur manque de moyens, il y a eu quelques larmes de crocodile et quelques larmes sincères, et puis c’est passé. En Tunisie, c’est l’immolation d’un homme qui a déclenché la révolution, et celles de l’Égypte et de la Libye ensuite. Chez nous, rien. Chez nous, on mange n’importe quoi, on ferme les usines, on laisse les narcotrafiquants faire leur loi sur des villes entières, on déplore tous les jours mille chômeurs supplémentaires, on assiste impuissants au désastre scolaire et, de toute façon, on conseille aux jeunes de quitter le pays, à moitié en espérant qu’ils reviendront moins bêtes, à moitié parce qu’on a abdiqué et qu’on veut leur éviter les années qu’on leur fabrique.

Comme il l’avait annoncé, le président déjà sortant gouverne dans la concertation, c’est-à-dire en prenant soin de ne rien enlever aux privilèges catégoriels et individuels et en laissant divers lobbies lui dicter sa politique : il est faible avec les banques, faible avec les Allemands, faible avec l’idéologie des sociologues de gauche (pléonasme), du magazine Elle et d’Harlem Désir (triple pléonasme), faible avec les syndicats (quadruple pléonasme), faible avec les barons locaux (quintuple). Il est le roitelet d’Ile-de-France à la main de vassaux plus puissants que lui.

Place au cauchemar fiscal

Cela lui convient : comme il est mou, incompétent et inexpérimenté, François Hollande ne peut décemment faire confiance à son propre jugement. Donc il laisse faire et ménage sa bonhomie, rétablissant, par exemple, la durée de ses déjeuners à 1 h 30, là où son prédécesseur l’avait réduite à 1 heure. On ne va pas lui reprocher de profiter des merveilles qui vieillissent dans les caves du palais de l’Élysée (sauf que, du coup, il grossit et semble dégouliner par-dessus les cols pelle à tarte de ses chemises comme un soufflé qui déborde). Lui qui a vécu, depuis ses plus jeunes années, avec le confort que procurent la sécurité de l’emploi et les salaires confortables de la haute fonction publique ne sait rien de l’anxiété du patron indépendant ou de l’angoisse de la mère de famille. Dès lors, il n’a aucun scrupule à mettre tranquillement en place un cauchemar fiscal, et ne dort pas moins bien quand il sait que la spoliation généralisée qu’il installe, au-delà de l’atteinte manifeste à une bonne partie des libertés constitutionnellement garanties qu’elle implique, se solde par des faillites en série, des ambitions tuées dans l’oeuf, des maisons de famille vendues, des espoirs déçus, j’en passe. M. Hollande aime l’impôt, prononce le terme avec gourmandise et, sous le couvert d’une justice sociale, exproprie une France qu’il exècre du peu qu’il lui restait. Il lui retire ses biens, évidemment, le plus possible, mais aussi son modèle familial, son lien historique avec l’Église, le cadre de vie qu’elle aimait, l’éducation qu’elle aurait voulu que ses enfants reçoivent, une idée qu’elle se faisait de son pays, qu’elle aurait bien aimé continuer à voir grand, et non vautrée là où la gauche engraissée l’y enfonce entre deux visites d’associations subventionnées, c’est-à-dire dans la médiocrité.

On pourrait songer à faire une nouvelle révolution

Il faut que le peuple français soit bien ramolli pour ne pas se lever en masse contre ces coups, quotidiens, permanents, à sa liberté, à sa dignité, à son histoire. Il faut dire qu’on met désormais les plus lucides sous antidépresseurs : si les cinq millions de personnes ainsi maintenues au calme marchaient sur l’Assemblée nationale, je ne donne pas cher de la peau des parlementaires. L’on sait, aussi, que le RMI, inventé par M. Fragonard, auquel le gouvernement a récemment demandé de réfléchir à de nouveaux impôts (sur les allocations familiales, en l’occurrence : il faut être socialiste pour songer à fiscaliser des allocations), transformé en RSA par M. Hirsch (issu d’une famille aux trois générations de fonctionnaires), a été conçu non par souci de solidarité, mais pour éviter d’éventuels troubles à l’ordre public qu’auraient pu causer les plus révoltés. On donne à ceux qui pourraient songer à faire une nouvelle révolution juste ce qu’il faut pour les abrutir, quelques miettes pour s’acheter de la malbouffe et de la sérotonine artificielle. Voilà ce qu’il reste, grâce à l’énarchie socialiste, du peuple qui jadis dictait au monde la marche à suivre.

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Par un retournement prévisible, la gauche a fait gagner le capitalisme ultralibéral. Sa détestation de l’idée nationale a détruit toute forme de patriotisme : la France ne se vit plus comme une patrie, ses citoyens ne se dessinent plus de destin collectif. Nous ne sommes plus qu’une région appauvrie et vieillissante du village mondial sur lequel règne Goldman Sachs. Ses aberrations idéologiques ont mis l’économie à terre, démotivé les entrepreneurs, effrayé les investisseurs étrangers. Nous sommes regardés comme un sublime pays mort. Sa francophobie a laissé se développer un communautarisme à l’américaine, avec un séparatisme territorial qui a installé, entre les différentes catégories de la population, un mélange de haine et de suspicion, de peur et de rejet, que les millions d’euros octroyés chaque année à SOS Racisme ne pourront juguler. Son délire progressiste a mis en pièces plusieurs siècles d’histoire, on est passé de Vaux-le-Vicomte aux barres d’immeubles, de Rameau à Sexion d’Assaut, d’Apostrophes à Canal+, de Ronsard à Christine Angot, du courage à la retraite anticipée, des bonnes manières aux injures. C’est fini, c’est trop tard. Pascale Clark a pris le pouvoir. Elle peut désormais, avec la bêtise goguenarde, méprisante et sûre d’elle qui la caractérise, triompher sur les ruines de ce qui lui a toujours échappé : l’élégance, la force, la classe, la fougue, le coffre, le souffle, une certaine conception du beau, un certain sens du charme, une certaine idée de la France. Qui se lèvera ?

Le Point

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